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UNE FEMME M’APPARUT…

pure. Je considérai son œuvre et je la jugeai mauvaise. Car la révolte de l’être fier contre l’oppression grondait déjà en moi.

« C’est alors que je composai mon poème de Vasthi, où je célébrais une des initiales rébellions féminines. Cette Vasthi, la première épouse d’Ahasuérus, plus belle et plus orgueilleuse que la craintive Esther, éblouit autrefois mon imagination juvénile. J’admirais la magnanimité de son défi, lorsque Ahasuérus lui ordonna de dévoiler aux courtisans ivres son visage glorieux comme le visage du soleil… Elle refusa de laisser profaner par les lubriques regards des satrapes son front mystérieusement splendide, et préféra mourir, répudiée et misérable.

« Et c’est pour cette hauteur d’âme que je la vénère et que je l’aime. »

San Giovanni se tut un instant.

Je me hâtai de l’interroger sur le mystère de sa vie amoureuse :

« Parlez-nous de votre douce compagne aux beaux sourcils, ô Saint pervers ! ».