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SILLAGES


Peut-il faire oublier le pas lassé des chèvres
Vers l’étable, et l’odeur des vignes de l’été ?…
Dors-tu tranquillement là-bas, en vérité,
Toi dont le nom divin est toujours sur nos lèvres ?

Toi qui fus la prêtresse et l’égale des Dieux,
Toi que vint écouter l’Aphrodite elle-même,
Dis-nous que ton génie est demeuré suprême,
Que le sommeil n’a pu s’emparer de tes yeux !

Parmi les flots pesants et les ombres dormantes,
Toi qui servis, dans sa beauté, l’Érôs vainqueur,
L’Érôs au feu subtil qui fait battre le cœur,
As-tu donc oublié le baiser des amantes ?

Les vierges de nos jours égalent en douceur
Celles-là que tes chants rendirent éternelles,
Les vignes de Lesbos sont toujours aussi belles,
La mer n’a point changé son murmure berceur.