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Dénouant leurs cheveux fluides, les Sirènes,
Ceintes de la langueur et du regret des morts,
S’approchent, un reflet de perles sur leurs corps.
Elles chantent… Leur voix se mêle aux clairs accords
Des vagues et du vent… J’entrevois les Sirènes…
Elles chantent l’amour qui corrode les veines
Comme un venin, et fait pleurer les yeux des morts…

Ô lâches compagnons d’Ulysse ! Pour une heure
Je donne l’existence humaine ! Pour un chant
Vaguement répété par la mer au couchant,
Pour un visage à peine entrevu, se penchant
Sur le miroir brisé des ondes, — pour une heure,
J’accepte le silence où le néant demeure,
Le silence où périt la mémoire du chant…