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THÉRÈSE

La mienne… attends que nous soyons rentrés à la maison. Elle s’en souviendra, la petite garce ! Je lui en flanquerai des mamours. Et le général qui voulait les marier ! C’est à crever de honte !

CHARLES

En effet, c’est gênant…

THÉRÈSE

Gênant ! Tu as de ces mots. Mais c’est de l’inceste pur et simple. Quand je pense…

(Elle éclate de rire.)

Et jusqu’à notre langage dans leurs bouches. Laisse-là cette pieuvre rose…

CHARLES

Je t’en supplie, une dernière fois, Thérèse ! Tout cela t’excite et tu t’énerves. Il y a des coïncidences, que diable ! on les exploite, c’est possible, mais on peut les détruire…

THÉRÈSE, l’entraînant vers le divan, et faisant mine de le caresser.

C’est trop tard.

CHARLES

Eh bien, ne te gêne plus ! Fais toutes les allusions obscènes que tu voudras, mais je t’avertis que si tu continues, je ne réponds plus de moi. Tant pis pour nous, tant pis pour toi tant pis pour tous.

(Il se renverse sur elle.)
VICTOR

Trop tard ! (Apparaissant.) Vous, madame, avec cette légèreté de guipure, et toi, mon père, cette faiblesse d’agneau, quelle touchante étoile au ciel de mon lit tous les soirs. Après le café, seul le ronflement de la machine à coudre de ma mère. Une chemise de nuit piquée de larmes, pour la rentrée de l’époux volage. Et moi je vous appelle “maman” dans mes rêves. Quelquefois j’entre dans votre salon, masqué, le revolver au poing, et je vous oblige à lire ce passage de l’Illiade :