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nées d’un Absolu, que l’image amoindrie d’une plus belle Réalité. Cette âme, cet Absolu, cette Réalité, qu’il les considère, suivant sa religion, comme Dieu personnel ou comme Conscience universelle, il s’efforce en tout cas, requis par l’Au-delà, de les imaginer, de les concevoir, de les appréhender derrière les formes illusoires de la nature visuelle. Encore que la représentation adéquate de l’Être suprême pour nous, êtres contingents, soit impossible, et que le symboliste le sache jusqu’à la douleur, celui-ci, à la manière de mystiques dont le mode de connaissance intuitif diffère des procédés habituels de la dialectique discursive, s’applique, non plus avec son entendement seul, mais avec son tout moi[1], à penser l’Absolu directement, à rendre « Dieu sensible au cœur ». Ne pouvant objectiver sa « vision en Dieu », ne pouvant, au moyen de simples concepts, exprimer directement l’Ineffable, le symboliste a entrepris de s’en approcher par voie de symboles et d’évoquer chez d’autres son propre sentiment indivulgable.

Le parnassien pense et parle par symboles. Le symboliste pense directement et le symbole ne devient qu’une manière détournée et pourtant nécessaire de se faire entendre. Le mode expressif du poète

  1. J’entends par son tout moi le Verstand et le Vernunft allemands réunis.