Page:Visan - Paysages introspectifs, 1904.djvu/202

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Heureuse de sentir après bien des détours,
L’âme s’acheminer vers l’antique lumière.
Les corps restitués dans leur beauté première
Gagnaient l’ombre imprécise et le galbe effacé
Des ruisseaux de candeur, furtifs et fiancés
Aux bocages d’amour où la grâce s’infuse.
Les esprits dépouillaient l’enveloppe confuse
De leur froideur d’idole et de leur vanité,
Et s’allégeaient d’un lest éphémère, emportés
Aux souffles triomphaux des concerts d’allégresse,
Vers les jardins du Verbe et ceux de la Sagesse.
Les nuages, souillés de crimes, avaient fui ;
Les sommets éternels s’érigeaient dans leur nuit,
Prêts à filtrer les flots d’une aurore nouvelle
Dont les lames déjà fusaient en étincelles.
Les lèvres se cherchaient pour le baiser de paix,
Les regards s’en allaient vers les lointains abstraits ;
Et les peuples, enfin vainqueurs de leurs entraves,
Se pressaient exultants autour de moi, qui, grave,
Le bras droit étendu vers le matin futur,
Indiquais le chemin et leur montrais l’azur.


« Je suis resté cent ans dans les cités des hommes
À semer l’idéal et la croyance, comme