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larmes furtives se compose votre sourire d’aujourd’hui. Ce sont trois années de mortelle résignation, qui ressurgissent derrière cette plainte toute simple, jaillie d’un cœur qui s’est donné à jamais : « un instant j’avais cru que la vie n’était pas pour moi ». Parole troublante dans une bouche de dix-huit ans, qui retentit au delà des douloureux sanglots du prophète.

Ni le soleil au-dessus de vos montagnes, ni les prairies suspendues aux flancs des collines, ni le fifre des bergers qui paissent leurs troupeaux aux clochettes aériennes, ni la plaine charmante couchée sous nos pieds, ni les figuiers de notre vigne, ni cet obscur instinct qui nous précipite vers toujours plus d’existence — n’ont eu raison d’un souvenir palpitant. Chacun de vos rosiers tressait à votre âme une guirlande de mélancolie : votre jeunesse était vide, car vous la remplissiez d’une absence.

Voilà pourquoi sachant le don des larmes et qu’une conversion ne s’annonce pas par