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voyagent la nuit par les routes froides, le havresac sur l’épaule et le gourdin en main ?

Quand même une heure plus propice aurait éclairé mon retour, je n’aurais pas sonné à la petite porte de votre clos. Avant de goûter les surprises de votre cher accueil et de m’assurer jusqu’à quel point l’image d’un absent peut grandir dans une mémoire aimante, je voulais d’abord pousser droit au château de mon père, d’où je repartirais absous, prêt à mieux m’agenouiller sous votre pardon.

Au dernier coude de la route, la pauvre vieille croix dressée à l’entrée du village m’apparut. Le poing du vent ni les coups de tête de l’orage n’étaient parvenus à la jeter à terre. Devenue seulement plus branlante, on eût dit qu’elle s’était encore inclinée pour me tendre sa couronne de houx. Je laissai à droite le chemin qui monte au bourg et pris par le sentier d’en bas, où vient buter la dernière pente de notre parc.