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avant de retrouver la lampe et l’essaim des lourdes pensées. À l’instant où les premiers roulements de tambour de la garde républicaine annoncent la fermeture des grilles, le plus illustre compagnon de mes années d’apprentissage et l’esthète le plus délibérément sceptique, Georges de la Marfé, s’écria : « Il nous faudrait une guerre. »

Ce cri d’intellectuel en flagrant délit de suprême détresse, lancé par un jeune homme de vingt-cinq ans, au bruit du tambour, nous aurait diverti à tout autre instant et procuré la mauvaise joie de renchérir sur l’ironie. Mais nous étions si las de nous-mêmes, si courbés sous le découragement, qu’aucun n’osa protester au nom de cette détestable philanthrophie humanitaire qu’en idéologues endurcis nous pensions de notre devoir de professer.

Que sont-ils devenus ces amis ? Certains furent charmants, leurs regards de moines sécularisés disaient la sincérité ; tous souffraient. Plusieurs, forcés de vite gagner leur