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Vain espoir ! ton destin poursuit partout sa proie :
Une autre Hélène encor embrase une autre Troie ;
Ton malheur vient encor d’un hymen étranger.
Toi, conserve un cœur ferme au milieu du danger :
Un bonheur imprévu t’attend dans ta détresse,
Tes premiers défenseurs te viendront de la Grèce ».
Ainsi de l’antre saint la prophétique horreur
Trouble sur son trépied la prêtresse en fureur ;
Ainsi le dieu terrible, aiguillonnant son âme,
La perce de ses traits, l’embrase de sa flamme,
Répand sur ses discours sa sainte obscurité,
Et même en l’annonçant voile la vérité.
Enfin sa rage tombe, et son délire cesse.
Enée alors reprend : « O sublime prêtresse !
De mon triste avenir ces terribles tableaux,
Ces aspects menaçants, ne me sont pas nouveaux.
Cent fois, anticipant ma pénible carrière,
J’ai tout prévu ; mais vous, exaucez ma prière ;
Puisque s’ouvre en ces lieux la porte de Pluton,
Que ce lac communique au sombre Phlégéthon,
Que d’un père chéri je revoie au moins l’ombre :
Vous-même guidez-moi dans cet abîme sombre.