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De son antre profond, terrible, l’œil en feu,
Impatiente encor, lutte contre le dieu.
Plus elle se débat, et plus il la tourmente,
S’imprime dans son cœur, sur sa bouche écumante,
Façonne son maintien, ses paroles, ses traits,
Et lui souffle des sons dignes de ses décrets.
D’elles-mêmes alors les cent portes s’ouvrirent,
Et ces accents sacrés dans les airs retentirent :
« Fais taire tes frayeurs, chef d’illustres bannis ;
Oui, sur les flots enfin tes malheurs sont finis.
Mais que la terre encor te garde de tempêtes !
Oui, je les garantis tes illustres conquêtes :
Les Troyens obtiendront les champs de Latinus,
Mais à quel prix sanglant ils seront obtenus !
Je vois, je vois la guerre et le meurtre et la rage,
Et le Tibre effrayé regorgeant de carnage.
Là de Bellone encor tu verras le drapeau,
Un nouveau Simoïs, un Achille nouveau,
Né, comme le premier, du sang d’une déesse.
Là de Junon encor la haine vengeresse
Des Troyens dévoués suivra partout tes pas.
Contre elle quels secours n’imploreras-tu pas !