Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 2.djvu/53

Cette page n’a pas encore été corrigée

Hors des murs, dans un bois qui d’un épais ombrage
D’un nouveau Simoïs ornait le doux rivage,
Figurant en gazon un triste et vain cercueil,
Offrait à son époux le tribut de son deuil.
Pour charmer ses regrets, loin des regards profanes,
A ce lugubre asile elle invitait ses mânes,
L’appelait auprès d’elle ; et, chers à ses douleurs,
Deux autels partageaient le tribut de ses pleurs,
L’un pour Astyanax, et l’autre pour son père :
Là pleurait tour à tour et l’épouse et la mère.
Je marche vers ces lieux ; mais son œil de plus près
A peine eut reconnu mon visage, mes traits,
Distingué mes habits et mes armes troyennes,
Elle tombe : son sang s’est glacé dans ses veines.
Elle reste longtemps sans force et sans couleur ;
Mais enfin, rappelant un reste de chaleur :
« Est-ce vous, me dit-elle, ou bien une vaine ombre ?
Ah ! si vous habitez dans la demeure sombre
Où mon Hector est-il ? » Elle dit ; et soudain
D’un long ruisseau de pleurs elle inonde son sein,
Et remplit tout le bois de sa voix douloureuse.
Aux transports, aux accents de sa douleur affreuse,