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Donyse aux verts bosquets, tant d’îles renommées,
Qui, sur les vastes mers, en cercle sont semées.
Tout à coup un cri part : « Voilà, voilà ces lieux,
Espoir de nos enfants, séjour de nos aïeux ».
Le vent s’élève en poupe ; on s’élance, on arrive,
Et de la Crète enfin nous atteignons la rive.
J’y fonde une cité ; je l’appelle Ilion :
L’heureuse colonie applaudit à son nom.
Je l’invite à chérir sa demeure nouvelle,
A bâtir de ses mains sa haute citadelle.
La mer rend les vaisseaux à ces tranquilles bords ;
L’hymen promet ses fruits, la terre ses trésors.
Je donne à tous des lois, des champs, des domiciles ;
Mais notre sort nous suit dans ces nouveaux asiles :
Un air contagieux, exhalant son poison,
Charge de ses vapeurs la brûlante saison ;
L’eau tarit, l’herbe meurt, et la stérile année
Voit sur son front noirci sa guirlande fanée.
Chaque jour a son deuil ; l’animal expirant
Perd la douce lumière, ou traîne un corps mourant :
Plus d’épis pour l’été, plus de fruits pour l’automne,
Et sur ces bords affreux la mort seule moissonne.