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A peine elle achevait, que du glaive cruel
Ses suivantes ont vu partir le coup mortel,
Ont vu sur le bûcher la reine défaillante,
Dans ses sanglantes mains l’épée encor fumante.
Soudain de tous côtés partent des cris affreux ;
Les dômes du palais et les voûtes des cieux
Retentissent au loin de clameurs lamentables.
La Renommée accroît ces bruits épouvantables.
La Terreur, à sa voix, vole de toutes parts ;
On dirait qu’une armée a brisé les remparts,
Et livre au fer tranchant, aux dévorantes flammes,
Les temples, les palais, les enfants et les femmes.
Sa sœur tremblante accourt à ce tumulte affreux ;
Et, meurtrissant son sein, arrachant ses cheveux,
Vers la reine expirante elle vole et l’appelle :
« Didon, il est donc vrai, tu me trompais, cruelle !
Quoi ! ce bûcher fatal, ces autels et ces feux
N’étaient donc de ta mort que les apprêts pompeux !
Elise en tous les temps partagea ta fortune ;
D’où vient que cette mort ne nous est pas commune ?
Par d’aussi durs mépris peux-tu payer ma foi ?
Didon, j’aurais du moins expiré près de toi.