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Que par tes soins secrets un bûcher se prépare ;
Qu’on y place le fer qu’a laissé le barbare,
Et toute sa dépouille, et ce lit conjugal,
De ma faiblesse, hélas ! le complice fatal.
Pour chasser de mon cœur un amour trop funeste,
Il nous faut de l’ingrat détruire ce qui reste ».
Elle dit, et pâlit. Mais cependant sa sœur
Ne peut de son projet soupçonner la fureur.
Elle n’augure pas de sa douleur cachée
Un désespoir plus grand qu’à la mort de Sichée,
Et dresse innocemment le fatal appareil.
  Dans un lieu retiré, mais ouvert au soleil,
Des rameaux du sapin, des longs éclats du chêne,
On forme le bûcher ; il s’élève, et la reine
Du sacrifice affreux fait les tristes apprêts,
Suspend en noirs festons la feuille du cyprès ;
Elle place au sommet la dépouille d’Enée,
Et ce lit nuptial qu’a maudit l’hyménée,
Et le fer du parjure, et son image, hélas !
Instruments et témoins de son prochain trépas.
Les autels sont dressés ; la prêtresse terrible
Court les cheveux épars, lance un regard horrible,