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Là, d’un cri lamentable, elle croyait l’entendre
Au fond de son tombeau l’inviter à descendre.
Tantôt l’affreux hibou, seul au sommet des toits,
Traînait en sons plaintifs son effrayante voix.
Tantôt à son esprit des souvenirs horribles
Représentaient des dieux les oracles terribles.
Quelquefois, dans l’horreur des songes de la nuit,
Elle croit voir Enée, elle l’appelle, il fuit !
Il fuit ; et, seule en proie à ses inquiétudes,
Elle croit traverser d’immenses solitudes,
Croit chercher ses sujets dans de lointains déserts.
Tel Penthée, après lui traînant tous les enfers,
Voit deux soleils aux cieux, deux Thèbes sur la terre,
Et cent spectres affreux qui lui livrent la guerre.
Tel Oreste éperdu croit voir à ses côtés
Sa mère secouant ses serpents irrités.
Plus loin, la torche en main, et rugissant de joie,
Alecton, qui l’attend, prête à saisir sa proie.
Enfin, au désespoir remettant son destin,
Elle aborde sa sœur ; et sous un front serein,
Cachant l’affreux projet qui couve dans son âme :
« Félicite ta sœur, dit elle : de ma flamme