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Soutient pompeusement sa tête dans les airs,
Et plonge sa racine au gouffre des enfers :
Tel était le héros ; son âme courageuse
Soutient de mille assauts la tempête orageuse ;
Les larmes, les sanglots le combattent en vain ;
Il gémit sur Didon, il pleure son destin ;
Il pleure ; mais son cœur demeure inébranlable.
Alors Didon frémit du revers qui l’accable,
Et sent le désespoir succéder à l’amour :
Elle implore la mort, elle est lasse du jour.
Nourrissant le projet que sa fureur enfante,
Cent présages affreux la glacent d’épouvante.
Elle voit, en offrant ses dons aux immortels,
Le lait en noirs ruisseaux couler sur les autels ;
Elle voit d’un vin pur les liquides offrandes
Ensanglanter leur marbre, et souiller leurs guirlandes.
Seule elle a remarqué ces présages d’horreur,
Et son muet effroi les tait même à sa sœur.
C’est peu : dans son palais sa tendresse fidèle
Fit bâtir pour Sichée un temple que son zèle
Entourait de festons, embellissait de fleurs.
De là sortaient la nuit de lugubres clameurs ;