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Ou dans ces noirs sentiers s’est-elle enfin perdue ?
Je ne sais ; mais le ciel ne me l’a point rendue ;
Et je ne m’aperçus de ce fatal revers
Que lorsque, parvenu sur ces coteaux déserts,
Sous l’antique cyprès j’eus déposé mon père.
Je cherche mon épouse, et mon fils une mère :
Seule elle était absente. En ces moments affreux,
Qui n’implorai-je point des hommes et des dieux ?
Non, Ilion en feu, non, cette nuit terrible,
Pour ce cœur déchiré n’eut rien de plus horrible.
Aussitôt, de mon fils, d’Anchise, de mes dieux,
Je laisse à mes amis le dépôt précieux ;
De là je cours à Troie, et couvert de mes armes,
Revole dans ses murs affronter les alarmes,
Braver, percer encor les nombreux bataillons,
Et des feux dévorants franchir les tourbillons.
Je retourne d’abord vers la voûte secrète
Dont le passage obscur seconda ma retraite ;
Je reviens sur mes pas, et d’un œil curieux
Mes avides regards interrogent ces lieux.
Partout règne le deuil, partout l’ombre effrayante,
Et le silence même ajoute à l’épouvante :