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Même les noirs corbeaux, bannissant la tristesse,
Annoncent les beaux jours par trois cris d’allégresse,
Et d’un gosier moins rauque expriment leur gaîté :
Souvent, au haut de l’arbre où flotte leur cité,
Vous voyez leurs ébats agiter le feuillage ;
Une douceur secrète attendrit leur ramage :
Ils aiment à revoir, depuis longtemps bannis,
Leur arbre hospitalier, leur famille et leurs nids.
Non que du ciel en eux la sagesse immortelle
D’un rayon prophétique ait mis quelque étincelle :
L’instinct seul les éclaire ; et lorsque ces vapeurs
D’où naissent tour à tour le froid et les chaleurs,
Ou des vents inconstants lorsque l’humide haleine
Change pour nous des cieux l’influence incertaine,
Les êtres animés changent avec le temps :
Ainsi, muet l’hiver, l’oiseau chante au printemps.
Ainsi l’agneau bondit sur le naissant herbage,
Et même le corbeau pousse un cri moins sauvage.
Mais, malgré ces leçons, crains-tu d’être séduit
Par le perfide éclat d’une brillante nuit ?
Du soleil, de sa sœur, observe la carrière.
Quand la jeune Phébé rassemble sa lumière,
Si son croissant terni s’émousse dans les airs,
La pluie alors menace et la terre et les mers.
Du fard de la pudeur peint-elle son visage ?
Des vents prêts à gronder c’est le plus sûr présage.
Le quatrième jour (cet augure est certain),
Si son arc est brillant, si son front est serein,
Durant le mois entier que ce beau jour amène,
Le ciel sera sans eau, l’aquilon sans haleine,
L’océan sans tempête ; et les nochers heureux
Bientôt sur le rivage acquitteront leurs vœux.
Le soleil à son tour t’instruit, soit dès l’aurore,