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Le charançon dévore un vaste amas de grains ;
Et le mulot remplit ses greniers souterrains.

Peut-être voudrais-tu, dès la saison de Flore,
Prévoir ce que pour toi l’été va faire éclore ?
Regarde l’amandier reverdir tous les ans,
Et courber en festons ses rameaux odorants :
Abonde-t-il en fleurs ? Par des chaleurs ardentes
Le soleil mûrira des moissons abondantes ;
Si des feuilles sans fruit surchargent ses rameaux,
Le fléau ne battra que de vains chalumeaux.
Des légumes souvent l’enveloppe infidèle
Déguise la maigreur des fruits qu’elle recèle.
Pour qu’ils soient mieux nourris, et pour rendre le grain
Plus prompt à s’amollir en bouillant dans l’airain,
J’ai vu dans le marc d’huile et dans une eau nitrée
Détremper la semence avec soin préparée :
Remède infructueux ! Inutiles secrets !
Les grains les plus heureux, malgré tous ces apprêts,
Dégénèrent enfin, si l’homme avec prudence
Tous les ans ne choisit la plus belle semence.
Tel est l’arrêt du sort : tout marche à son déclin.
Je crois voir un nocher, qui, la rame à la main,
Lutte contre les flots, et les fend avec peine ;
Suspend-il ses efforts ? L’onde roule et l’entraîne.
Il faut savoir encore interroger les cieux.
L’Arcture, les Chevreaux, le Dragon lumineux,
Sont pour le laboureur d’aussi fidèles guides
Que pour l’adroit nocher, qui sur des mers perfides,
Implorant son pays la terre, et le repos,
Du détroit de Léandre ose affronter les flots
Observe donc leur cours. Sitôt que la Balance
Du travail, du repos, du bruit et du silence,
Rendra l’empire égal, et du trône des airs
Entre l’ombre et le jour suspendra l’univers,
Avant que des vents froids le souffle la resserre,