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Il dédaigna leurs feux, et leur main sanguinaire,
La nuit, à la faveur des mystères sacrés,
Dispersa dans les champs ses membres déchirés.
L’Hèbre roula sa tête encor toute sanglante :
Là, sa langue glacée et sa voix expirante,
Jusqu’au dernier soupir formant un faible son,
D’Eurydice, en flottant, murmurait le doux nom :
Eurydice ! ô douleur ! Touchés de son supplice,
Les échos répétaient, Eurydice ! Eurydice ! »
Le devin dans la mer se replonge à ces mots,
Et du gouffre écumant fait tournoyer les flots.
Cyrène de son fils vient calmer les alarmes :
« Cher enfant, lui dit-elle, essuie enfin tes larmes ;
Tu connais ton destin. Eurydice autrefois
Accompagnait les chœurs des nymphes de ces bois ;
Elles vengent sa mort : toi, fléchis leur colère :
On désarme aisément leur rigueur passagère.
Sur le riant Lycée, où paissent tes troupeaux,
Va choisir à l’instant quatre jeunes taureaux ;
Choisis un nombre égal de génisses superbes,
Qui des prés émaillés foulent en paix les herbes ;
Pour les sacrifier élève quatre autels ;
Et, les faisant tomber sous les couteaux mortels,
Laisse leurs corps sanglants dans la forêt profonde.
Quand la neuvième aurore éclairera le monde,
Au déplorable époux dont tu causas les maux,
Offre une brebis noire et la fleur des pavots ;
Enfin, pour satisfaire aux mânes d’Eurydice,
De retour dans les bois, immole une génisse. »
Elle dit : le berger dans ses nombreux troupeaux
Va choisir à l’instant quatre jeunes taureaux ;
Immole un nombre égal de génisses superbes,
Qui des prés émaillés foulaient en paix les herbes.