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Aucun ne doit périr, mais tous doivent changer ;
Et, retournant aux cieux en globe de lumière,
Vont rejoindre leur être à la masse première.
Enfin veux-tu ravir leur nectar écumant ?
Devant leur magasin porte un tison fumant,
Et qu’une onde échauffée en roulant dans ta bouche,
Pleuve, pour l’écarter, sur l’insecte farouche.
L’abeille est implacable en son inimitié,
Attaque sans frayeur, se venge sans pitié :
Sur l’ennemi blessé s’acharne avec furie,
Et laisse dans la plaie et son dard et sa vie.
Deux fois d’un miel doré ses rayons sont remplis,
Deux fois ces dons heureux tous les ans sont cueillis ;
Et lorsque abandonnant l’humide sein de l’onde
Taygète monte aux cieux pour éclairer le monde ;
Et lorsque cette nymphe, au retour des hivers,
Redescend tristement dans le gouffre des mers.
Toutefois, si l’hiver, alarmant ta prudence,
Te fait de tes essaims craindre la décadence,
Epargne leurs trésors dans ces temps malheureux,
Et n’en exige point un tribut rigoureux ;
Mais parfume leurs toits, et prends les rayons vides
Dont viennent se nourrir leurs ennemis avides.
La chenille en rampant gagne leur pavillon !
Le lourd frelon se rit de leur faible aiguillon :
Le lézard de leur miel se nourrit en silence ;
Leur travail de la guêpe engraisse l’indolence ;
Des cloportes sans nombre assiègent leur palais ;
Et l’impure araignée y suspend ses filets.
Mais plus on les épuise, et plus leur diligence
De l’état appauvri répare l’indigence.
Comme nous cependant ces faibles animaux
Eprouvent la douleur et connaissent les maux ;