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Aucun bruit ne l’émeut ; le premier du troupeau,
Il fend l’onde écumante, affronte un pont nouveau :
Il a le ventre court, l’encolure hardie,
Une tête effilée, une croupe arrondie ;
On voit sur son poitrail ses muscles se gonfler,
Et ses nerfs tressaillir, et ses veines s’enfler :
Que du clairon bruyant le son guerrier l’éveille,
Je le vois s’agiter, trembler, dresser l’oreille ;
Son épine se double et frémit sur son dos ;
D’une épaisse crinière il fait bondir les flots ;
De ses naseaux brûlants il respire la guerre ;
Ses yeux roulent du feu, son pied creuse la terre.
Tel dompté par les mains du frère de Castor,
Ce Cyllare fameux s’assujettit au mors ;
Tels les chevaux d’Achille et du dieu de la Thrace
Soufflaient le feu du ciel, d’où descendait leur race ;
Tel Saturne, surpris dans un tendre larcin,
En superbe coursier se transforma soudain,
Et, secouant dans l’air sa crinière flottante,
De ses hennissements effraya son amante.
Quel que soit le coursier qu’ait adopté ton choix,
Quand des ans ou des maux il sentira le poids,
Des travaux de l’amour dispense sa faiblesse :
Vénus ainsi que Mars demande la jeunesse.
Pour son corps, dévoré d’un impuissant désir,
L’hymen est un tourment, et non pas un plaisir ;
Vieil athlète, son feu dès l’abord se consume :
Tel le chaume s’éteint au moment qu’il s’allume.
Connais donc et son âge, et sa race, et son cœur,
Et surtout dans la lice observe son ardeur.
Le signal est donné : déjà de la barrière
Cent chars précipités fondent dans la carrière ;