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Se joignent aux concerts de leurs accents sauvages.
Achevons de dicter ces champêtres leçons ;
Et ma muse bientôt, par de plus nobles sons,
Fera vivre les faits du héros que j’adore,
Plus longtemps que l’époux de la brillante aurore.
Veut-on pour vaincre à Pise un coursier généreux ?
Veut-on pour la charrue un taureau vigoureux ?
Des mères avec soin il faut choisir l’espèce.
Je veux dans la génisse une mâle rudesse,
Une oreille velue, un regard menaçant,
Des cornes dont les dards se courbent en croissant ;
Que son flanc allongé sans mesure s’étende ;
Vers la terre en flottant que son fanon descende ;
Qu’enfin ses pieds, sa tête et son cou monstrueux,
De leur beauté difforme épouvantent les yeux.
J’aime aussi sur son corps, taché par intervalles,
Et de noir et de blanc les marques inégales ;
J’aime à lui voir du joug secouer le fardeau,
Par son mufle sauvage imiter le taureau,
Menacer de la corne, et, dans sa marche altière,
D’une queue à longs crins balayer la poussière.
L’âge, soit de l’hymen, soit du travail des champs,
Après quatre ans commence, et cesse avant dix ans.
Ces jours sont précieux : dès le printemps de l’âge
Livre au taureau fougueux son amante sauvage ;
Qu’elle laisse en mourant de nombreux héritiers.
Hélas ! Nos plus beaux jours s’envolent les premiers ;
Un essaim de douleurs bientôt nous environne ;
La vieillesse nous glace et la mort nous moissonne.
Préviens donc leur ravage, et que dans tes troupeaux
L’hymen forme toujours des nourrissons nouveaux.
Dans le choix des coursiers ne sois pas moins sévère
Du troupeau, dès l’enfance, il faut soigner le père :
Des gris et des bais-bruns on estime le cœur ;
Le blanc, l’alezan clair languissent sans vigueur ;
L’étalon généreux a le port plein d’audace,
Sur ses jarrets pliants se balance avec grâce ;