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Et, présentant au loin une plaine enflammée,
Roule un torrent de flamme et des flots de fumée,
Surtout si l’aquilon s’élève en ce moment,
Et chasse devant lui ce vaste embrasement.
Dès lors plus d’espérance : atteints dans leurs racines,
N’attends pas que tes ceps réparent leurs ruines ;
La race en est éteinte, et jamais ne revit :
L’auteur seul de sa mort, l’olivier lui survit.
Tu n’iras pas non plus, quand le froid la resserre,
Confier vainement tes vignes à la terre :
Alors son suc oisif, glacé dans ses canaux,
Refuse de nourrir les jeunes arbrisseaux.
Avec plus de succès les vignes sont plantées,
Soit lorsque, déployant ses ailes argentées,
L’ennemi des serpents vient, après les frimas,
Retrouver les beaux jours dans nos riants climats ;
Soit lorsque le soleil, sur son char plus rapide,
De l’été vers l’hiver conduit l’automne humide.
Mais le printemps surtout seconde tes travaux ;
Le printemps rend aux bois des ornements nouveaux :
Alors la terre, ouvrant ses entrailles profondes,
Demande de ses fruits les semences fécondes.
Le dieu de l’air descend dans son sein amoureux,
Lui verse ses trésors, lui darde tous ses feux,
Remplit ce vaste corps de son âme puissante ;
Le monde se ranime, et la nature enfante.
Dans les champs, dans les bois, tout sent les feux d’amour ;
L’oiseau reprend sa voix ; les zéphyrs, de retour,
Attiédissent les airs de leurs molles haleines ;
Un suc heureux nourrit l’herbe tendre des plaines ;
Aux rayons doux encor du soleil printanier
Le gazon sans péril ose se confier ;
Et la vigne, des vents bravant déjà l’outrage,
Laisse échapper ses fleurs, et sortir son feuillage.
Sans doute le printemps vit naître l’univers ;
Il vit le jeune oiseau s’essayer dans les airs ;
Il ouvrit au soleil sa brillante carrière,