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le fer étincelant. « Les voilà, s’écrie-t-il alors, les voilà, ces champs, cette Hespérie, dont la démence méditait la conquête ! va maintenant, misérable Phrygien ; que ton cadavre, gisant sur la poussière, les mesure à loisir. C’est le digne loyer qu’obtiennent les téméraires dont le glaive ose provoquer Turnus : ainsi leurs mains bâtissent des cités. »

Il dit ; et ses dards plus prompts que l’éclair joignent au fils de Dolon Asbutès et Chlorée, Sybaris et Darès, Thersiloque et Thymète ; Thymète, qu’entraîna dans sa chute son coursier trébuchant. Tel qu’échappé des antres édoniens, Borée déploie sur les mers de l’Attique ses bruyantes haleines ; au souffle des vents déchaînés, les flots tumultueux se précipitent vers le rivage, et les nuages amassés dans les creux s’enfuient et se dispersent : tel, aux approches de Turnus, au bruit de son char vagabond, tout plie, tout se renverse ; et les phalanges dispersées couvrent la plaine de leurs débris épars. Sa fougue emporte le héros ; et les vents, qu’il heurte en sa course, tourmentent sur sa tête son panache flottant.

Indigné de tant d’audace, outré de tant de fureurs, Phégée se jette au-devant des coursiers, saisit leur frein blanchi d’écume, et d’une main vigoureuse détourne leur essor. Tandis que le char l’entraîne, suspendu au timon, la lance au large fer l’atteint au défaut du pavois, perce le double airain de sa cuirasse, et l’effleure d’une blessure légère. Lui, non moins intrépide, il oppose son bouclier, se dresse fièrement contre son ennemi, et, s’avançant