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déchire de ses griffes aiguës : le sang de sa victime et ses plumes arrachées pleuvent du haut des airs.

Cependant le père des dieux et des hommes daignait observer ces combats ; et, du haut de l’Olympe où domine son trône, son œil en suivait les hasards. Tout à coup il allume dans l’âme de Tarchon la soif des vengeances, irrite son courage, et le tourne en fureur. Soudain le héros toscan précipite son coursier à travers le carnage, à travers les rangs en désordre ; il ranime par ses cris les bataillons épars, appelle par leurs noms les guerriers qui chancellent, et ramène à la charge les bandes fugitives. « Quel vertige vous égare ? ô faibles Tyrrhéniens ! cœurs lâches ! cœurs insensibles à l’honneur ! Quelle indigne torpeur enchaîne votre audace ? Une femme vous fait peur ! une femme enfonce et disperse vos bataillons armés ! Pourquoi ce fer ? pourquoi ces dards impuissans dont vos mains sont chargées ? Ah ! ce n’est point avec cette indolence que vous courez aux combats de Vénus, à ses luttes nocturnes : dès que la flûte recourbée donne le signal des orgies, on vous voit alors, courageux convives et buveurs intrépides, fêter en chœur Bacchus et les Amours. Voilà vos nobles jeux, voilà vos glorieux plaisirs. Heureux, quand un augure favorable vous invite au banquet religieux, et qu’une victime choisie vous appelle au fond des bois sacrés ! »

À ces mots, bravant le premier la mort, il s’élance au fort de la mêlée, fond sur Vénulus avec l’impétuosité de la foudre, l’arrache à son coursier, et, le