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et sa gueule béante, et sa vaste mâchoire, et ses dents effroyables ; un pieu rustique arme sa main agreste : il s’agite fièrement au milieu des escadrons, et surpasse de la tête les combattans qui l’environnent. Camille fond sur eux, les disperse, et, le joignant lui-même, l’étend mort sur la poudre ; puis d’un ton courroucé : « Croyais-tu, farouche Tyrrhénien, faire ici la guerre aux hôtes des forêts ? Il est venu, le jour où le bras d’une femme devait châtier tes insolentes menaces. Va rejoindre à présent les mânes de tes pères : tu pourras leur vanter ta mort ; c’est le fer de Camille qui te plonge aux enfers. »

Elle dit, et se précipite sur Orsiloque et Butès, deux géans, l’orgueil des Phrygiens. Butès osait l’attendre : il expire, atteint de la lance fatale entre la cuirasse et le casque, à l’endroit où le cou sans défense s’offre au fer du vainqueur, et d’où le bouclier descend pour couvrir le flanc gauche. Orsiloque à son tour, jouet d’une fuite simulée, décrit un cercle immense en courant après la guerrière : tout à coup elle échappe dans un cercle moins vaste, et poursuit à son tour celui qui la poursuivait. Alors se dressant toute entière, et levant sa lourde hache, elle en frappe à coups répétés et le casque et le front du Troyen. Vainement il conjure, il supplie : terrible, elle redouble ; il meurt tout souillé des débris de son cerveau fumant.

Mais quel est ce guerrier que son malheur amène au devant d’elle, et qui s’arrête, saisi d’effroi au seul aspect de l’héroïne ? C’est le fils d’Aunus, hôte rusé