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prémices d’un triomphe plus grand. Terrassé par ma main, cet orgueilleux Mézence, le voilà. Maintenant les chemins sont ouverts jusqu’au roi des Latins, jusqu’aux remparts de Laurente. Préparez vos courages à de nobles assauts, veillez dans l’espoir des combats : ainsi, dès que les dieux auront permis à vos drapeaux de se déployer dans la plaine, à vos phalanges d’abjurer le repos des camps, rien n’enchaînera votre audace, et vous volerez sans pâlir à de glorieux périls. Mais avant tout, songeons aux restes sans sépulture de nos compagnons expirés : couvrons-les d’une terre pieuse, seul honneur qui console les morts dans le ténébreux séjour. Allez ; que ces âmes généreuses, dont le sang versé nous conquit une patrie nouvelle, reçoivent vos derniers adieux et vos tributs funèbres : jusqu’aux remparts désolés du malheureux Évandre, accompagnez Pallas ; Pallas, dont la valeur n’a point failli, mais qu’un sort cruel ravit à la lumière, et plongea dans l’ombre infernale. »

Ainsi parlait Énée, les yeux mouillés de larmes. En même temps il tourne ses pas vers le seuil funéraire où le corps glacé du jeune prince reposait sous la garde du vieil Acétès ; d’Acétès, autrefois écuyer d’Évandre, et devenu depuis, mais sous de moins heureux auspices, le Mentor du héros naissant. Là se pressaient, à l’entour de Pallas, et la foule éplorée de ses fidèles serviteurs, et des flots de Troyens en deuil, et les Troyennes plaintives, gémissant les cheveux épars. À peine le fils d’Anchise a pénétré