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traits ailés, que leurs longues clameurs l’insultent et le fatiguent : lui, sans effroi, il fait front de toutes parts, et, grinçant de rage, secoue de son bouclier les dards qui le hérissent.

Là combattait Acron, venu des antiques frontières de Corythe, mais né dans la Grèce, et regrettant loin du foyer natal un hymen imparfait. Pendant qu’il porte parmi les Rutules le trouble et l’épouvante, son éclatante aigrette et son écharpe de pourpre, vains présens d’une amante, ont attiré de loin les regards de Mézence. Tel qu’on voit un lion à jeun promener, en rugissant, dans les forêts profondes la faim cruelle qui le tourmente : si le hasard offre à sa vue un chevreuil aux pieds agiles, un cerf au bois altier, soudain bondissant de joie, il ouvre une gueule immense, hérisse sa crinière, et, tombant sur sa proie, s’y attache et la déchire : son mufle horrible dégoutte de carnage : tel s’élance au fort des ennemis le féroce Mézence. Tu tombes, malheureux Acron ! tes pieds mourans s’agitent sur l’homicide arène, et tes armes brisées sont rougies de ton sang. Orode fuyait, emporté par la peur : le tyran dédaigne de le percer par derrière, et veut que sa victime voie arriver la mort. Il court, l’atteint, l’arrête, et le pressant corps à corps, le terrasse et triomphe, non par la ruse, mais par la force et l’audace. Alors appuyant la lance et le pied sur son rival abattu : « Victoire, compagnons ! le grand, le formidable Oronte a mesuré la terre ! » Il dit, et ses soldats, applaudissant en foule, ont répété « Victoire ! » L’infortuné, d’une voix prête à s’éteindre : « Qui que