Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/165

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remparts, les légions fidèles se partagent le danger ; chacun veille et s’anime au devoir que le sort lui confie.

À l’une des portes se distinguait Nisus, intrépide guerrier qu’Hyrtacus mit au jour. Jadis fier chasseur de l’Ida, maintenant compagnon d’Énée, il excelle à lancer le javelot rapide et la flèche légère. À ses côtés est Euryale ; Euryale, jeune ami de Nisus. Nul, parmi les Troyens, ne l’efface en beauté ; nul, avec plus d’éclat, ne brilla jamais sous les armes. Aimable enfant ! à peine commence à poindre, sur ses joues virginales, le duvet de l’adolescence. Toujours unis, toujours on les voyait ensemble ; ensemble ils volaient aux combats ; et dans ce moment même, placés ensemble à la même porte, ils la gardaient ensemble. Tout à coup Nisus : « Est-ce un dieu qui m’enflamme, cher Euryale ? ou chacun se fait-il un dieu du fantôme qu’il aime ? Je ne sais ; mais la soif des hasards, mais le besoin d’un grand exploit, depuis long-temps tourmentent mon courage : je suis las enfin du repos qui m’enchaîne. Tu vois à quelle sécurité s’abandonnent les Rutules. Ensevelis dans les vapeurs du sommeil et du vin, ils dorment !… leurs feux mourans pâlissent, et dans leur camp règne un vaste silence. Apprends donc quel projet roule en ma pensée, quel espoir mon âme a conçu. Le peuple, les grands, l’armée, tous redemandent le fils d’Anchise. Heureux qui, perçant jusqu’à lui, le ramènerait triomphant ! Eh bien ! qu’on t’assure, Euryale, le prix de mon audace : l’honneur me suffit, et je pars. J’espère trouver, sous