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suspendues en grappes à ses branches légères, s’y balancent au gré des zéphyrs. Aussitôt un prêtre inspiré : « Je vois un noble étranger, dit-il, s’avancer vers nos bords ; je vois un essaim de héros, parti des mêmes climats, descendre aux mêmes régions, et du haut de ces tours commander à l’Hespérie. » Une autre fois, tandis que Latinus brûlait en l’honneur de ses dieux les parfums de l’encens, Lavinie, aux pieds des autels, mêlait ses vœux à ceux d’un père. Soudain, ô terreur ! le feu sacré saisit sa longue chevelure, dévore en pétillant tous ses riches atours, embrase ses tresses royales, embrase son diadème éclatant de rubis, et, l’enveloppant toute entière de flamme et de fumée, se promène autour d’elle en ardent tourbillon. Signe merveilleux ! s’écrie-t-on de toutes parts ; signe à la fois de colère et d’amour, qui promet à Lavinie le bonheur et la gloire, mais qui annonce au Latium la guerre et ses fureurs !

Cependant alarmé de ces prodiges, le monarque a recours aux oracles de Faune, à ces avis d’un père pour qui l’avenir est sans voiles. Il s’enfonce sous les bois religieux qui couronnent l’antique Albunée, dont les ondes mystérieuses s’épanchent en murmurant à travers la forêt profonde, et dont la source aux verts ombrages exhale des vapeurs sulfureuses. C’est là que les enfans d’Œnotrus, que tous les peuples de l’Italie, viennent chercher des réponses dans leurs incertitudes. Là, durant la nuit silencieuse, quand l’autel chargé d’offrandes s’est rougi du sang des victimes, le pontife, étendu sur leurs dépouilles récentes, s’endort d’un sommeil prophétique. Alors, il