Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/59

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nom vous donner, vierge auguste ? car ces traits, ces accents, ne sont point d’une mortelle ; tout en-vous trahit une divinité. Salut, fille du ciel ! sœur de Phébus, ou nymphe de ces bois, salut ! Puissiez vous nous être propice ! et quels que soient vos destins, daignez compatir à nos peines ; daignez nous apprendre sous quel astre lointain, sur quelle rive inconnue le sort nous a jetés. Les hommes et les lieux, tout ici est nouveau pour nous : poussés sur ces bords par les vents et les flots en furie, nous foulons une terre ignorée. Jeune Immortelle, guidez nos pas : nos mains reconnaissantes immoleront sur vos autels des victimes sans nombre. »

Vénus alors : « Je suis loin de prétendre à de tels honneurs : ce carquois, ce cothurne, cette pourpre éclatante, sont la parure accoutumée des filles de Sidon. Vous voyez les états Puniques, des tribus Phéniciennes, une ville d’Agénor. Ces champs voisins sont la Lybie, contrée féconde en guerriers : Didon régit cet empire ; Didon, qui s’exila des murs de Tyr, pour fuir un frère persécuteur. Sa longue injure exigerait un long récit : mais il me suffira d’en effleurer rapidement l’histoire.

«  Didon eut Sichée pour époux, Sichée dont la Phénicie vantait l’opulent domaine, et que sa malheureuse épouse chérissait du plus tendre amour. Elle était passée, vierge encore, des mains d’un père dans les bras d’un époux, et ces premiers nœuds semblaient formés sous des auspices favorables. Mais son frère, l’infâme Pygmalion, siégeait sur le trône de Tyr ; et tous les crimes y siégeaient