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— Et votre cousin Charles-Gustave, ne l’avez-vous pas aimé, Christine ? demanda timidement Ebba, assise sur un coussin, aux pieds de son amie.

— Était-ce vraiment de l’amour ? murmura la reine, comme se parlant à elle-même. Plutôt, je crois, une affection fraternelle que les circonstances avaient portée jusqu’à la tendresse. Il était le seul jeune garçon de mon enfance, entourée de barbes grises. De quatre ans mon aîné, il me protégeait. J’avais de l’admiration pour sa force, sa haute taille élevée, — moi haute comme trois pommes jusqu’à seize ans, — pour tout ce qu’il y avait en lui de fougue et de vitalité. J’estimais son adresse dans tous les exercices du corps ; j’aimais surtout, je crois, ses beaux traits virils, ses grands yeux pleins d’ardeur… C’est plus tard seulement que son visage s’est empâté, sa tournure alourdie.

— Je me souviens, en effet, qu’il y a huit ans, lors de mon arrivée auprès de vous, Charles-Gustave était un des plus beaux cavaliers de la Cour.

— Ma mère, il est vrai, ne l’aimait guère, continua Christine. Elle l’accusait de jactance et de vanité. Un jour, je le défendis avec tant de feu qu’elle me lança, je m’en souviens, un singulier regard. Elle avait déjà ses projets sur les fils de son soupirant, Christian de Dane-