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VII


Près d’un an plus tard, en 1633, Christine attendait dans le port de Stockholm l’arrivée de sa mère.

Elle vit d’abord descendre du bateau, cambré sous son fier diadème de voiles blanches, le cercueil de bronze dans lequel reposait le corps embaumé de son père.

Alignés sur le quai, des soldats de Gustave-Adolphe, ses anciens compagnons de bataille et de victoire, présentaient les armes, raides et figés, tandis que les larmes coulaient sur leurs moustaches grises.

Le peuple regardait et soupirait :

— Notre roi, le plus grand des rois, le meilleur des hommes !

Christine restait muette et sans larmes. Qu’y avait-il de commun entre ce lourd sarcophage et l’image si vivante du père à la tête dorée, aux vifs mouvements, à la voix claironnante ?

Mais Marie-Éléonore apparut, gémissante, soutenue par ses femmes, plus blanche encore dans ses voiles de deuil. Quand elle aperçut l’enfant qu’elle avait si mal accueillie à sa naissance, si peu aimée plus tard, elle se jeta sur elle et la pressa contre son sein avec une violence désespérée :

— Christine, ma fille chérie, mon seul bien, te voilà enfin ! s’écria-t-elle. Comme tu lui ressembles : son front, son nez, son sourire et son regard étincelant qui pour moi s’adoucissait si tendrement ! Comment n’ai-je pas remarqué plus tôt cette singulière ressemblance ? Viens, mon enfant, tu ne me quitteras plus. C’est ensemble que nous le pleurerons !