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le secret de la reine christine

— De gré ou de force, je vous enlève !

Dans la chambre où Clairet venait d’apporter à Christine son sac de selle, celle-ci demeurait incertaine, ne sachant que faire ni que dire. Le valet qui l’épiait du coin de l’œil, sourit et disparut. Elle regardait tantôt, côte à côte, les deux lits à courtines de serge verte, tantôt la cruche d’eau et le cuveau à toilette placés dans un angle, tantôt encore la fenêtre faiblement éclairée par la lune devant laquelle se balançait et brillait l’enseigne de cuivre.

— Mais… où est donc le Comte ? demanda-t-elle.

— Sentinelli ? Sans doute ne le reverrons-nous pas avant demain. Je l’ai vu avant le dîner, serrant de près une des servantes. Telle est la raison blonde et bien en chair de sa sollicitude pour nos bagages ! Mais pourquoi ne vous dévêtez-vous pas, Chevalier ? Monaldeschi qui avait déjà enlevé son justaucorps et ses bottes s’était rapproché de Christine.

— Je devine, fit-il. Vos bras ont sans doute été froissés par votre chute. Vous souffrez et ne pouvez les soulever. Laissez-moi vous aider…

Et d’un geste vif, il déboutonna le pourpoint de la jeune fille et l’ouvrit d’un coup jusqu’à la ceinture.

Celle-ci poussa un faible cri, en croisant ses deux mains sur sa poitrine, puis : »

— Que faites-vous, Monsieur ? Partez ! Je vous l’ordonne ! fit-elle d’une voix irritée.

En même temps une rougeur de braise envahissait son visage de la base du cou jusqu’au front.

Monaldeschi recula de quelques pas puis demeura immobile. Les expressions les plus diverses se succédaient sur ses traits mobiles, dans ses regards, depuis la stupéfaction incrédule jusqu’à la joie émerveillée. Puis, recouvrant le sentiment, il se jeta aux pieds de Christine.

— Ah ! Madame, Madame ! Excusez-moi de ne pas avoir deviné plus tôt… Votre beauté, votre charme, la douceur de vos grands yeux et de votre voix auraient pourtant dû vous trahir et me prévenir !… Mais pourquoi ce déguisement ? Qui vous y a contrainte r Seriez-vous en quelque souci ? Vous persécuterait-on ?