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le secret de la reine christine

Elle souriait encore quand elle s’éveilla deux heures plus tard, alerte et fraîche comme une écolière en vacances, et sauta hors de son lit.

— Allons, Jean ! Allons, Clairet ! cria-t-elle. Vite ! C’est mon premier jour de liberté et il fait beau.

Jean Holm, le vieux serviteur suédois qui l’avait vue naître, et Clairet Poissonnet, le valet de chambre français que lui avait donné Chanut quelques années auparavant, arrivèrent de l’antichambre en se frottant les yeux, l’un un peu renfrogné, l’autre alerte et joyeux.

— Clairet, apporte mon habit de cheval, celui qui a une veste en peau de chamois et une ceinture en boucles de cuivre. Plus vite que ça. Cherche aussi mon toquet à plume de geai et mon coutelas de voyage dans sa gaine de corne ! Et toi, Jean, prends tes gros ciseaux. Bon ! Et maintenant, coupe-moi les cheveux ! Les ciseaux tombèrent sur le dallage.

— Comment, Madame ? balbutia le pauvre homme.

— Tu n’as pas compris ? Prends cette écuelle, pose-la moi sur la tête et coupe tout ce qui dépasse !

Jean Holm leva les yeux au ciel :

— De si beaux cheveux, gémit-il, et qui allaient si bien à Votre Majesté !

— Il n’y a plus de Majesté, Jean, souviens-toi de ça ! Tu n’as plus comme maître qu’un jeune gentilhomme qui voyage pour ses études et pour son plaisir…

Un instant plus tard, un cavalier, botté de cuir rouge, coiffé d’un petit feutre crânement planté sur des cheveux courts qui formaient sur le front une frange arrondie, se présenta devant le vieux comte de Dohna, éberlué.

Comte, fit Christine en le saluant avec désinvolture, je vous remercie de votre hospitalité et vous présente votre fils, le chevalier de Dohna, qui vient prendre congé de vous.

— Qu’est-ce que cela signifie, Madame ? s’écria le malheureux comte, ahuri. Mais je préparais notre départ pour Kalmar où l’on nous attend.