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LE SECRET DE LA REINE CHRISTINE

XIV


Christine fit au galop, d’un seul trait, les huit lieues qui la séparaient du château, penchée sur sa selle, ne relevant le buste que pour cravacher son cheval, aussi violemment qu’elle avait cravaché le valet, descendant les pentes à une allure de vertige, sautant les fossés, grimpant les talus, risquant cent fois une chute mortelle.

Ses deux prétendants, la mine morose, se sentant cette fois définitivement évincés, et Magnus, poussiéreux, déchiré, le visage et les mains égratignés, mais cachant mal, sous un air contrit, son triomphe et sa joie, la suivaient à distance respectueuse. Quant à Ebba, elle dut très vite renoncer à escorter sa maîtresse, et demeura à l’arrière dans son traîneau, pour le plus grand bonheur de Jacob de la Gardie qui s’efforçait de calmer la belle affligée, sans oublier de plaider la cause de son amour.

À la porte du château, la reine abandonnant dans la cour sa monture frémissante et fourbue, courut jusqu’à sa chambre et se jeta sur son lit de repos, cachant sous les coussins son visage embrasé.

Si la fatigue avait rompu son corps, ses nerfs étaient à vif, son cœur battait tumultueusement.

Jamais son orgueil n’avait autant souffert.