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criquet

— À moins que tu ne préfères coucher dehors, ma chère sœur ? continue paisiblement M. Dayrolles. Donc, un ici, un autre du même genre chez le douanier pour miss Winnie et Suzanne, et un matelas pour les gosses. Quant aux hommes, il leur reste une écurie et des bottes de varech…

Les hommes… une écurie… du varech ! Camille, radieuse, les yeux brillants, le cœur battant d’impatience et d’espoir, bondit comme un ressort jusqu’à son père, se pend à sa manche et souffle :

— Oh ! papa, j’en suis bien, avec toi et Michel ?

— Tiens, Criquet, au fait, je t’avais oubliée, fait M. Dayrolles… Après tout, ajoute-t-il en hésitant, je crois qu’il n’y a pas d’inconvénient à ce que tu nous accompagnes, n’est-ce pas, miss Winnie ?

— René ! clame tante Éléonore, indignée. Tu n’y penses pas, mon ami ! Camille, à son âge, coucher avec des matelots !

— Oh ! tante, pour une fois ! implore Criquet, les mains jointes, les yeux aussitôt voilés de grosses larmes.

— Pour une fois ! Quelle inconscience ! Non, mon enfant, tu resteras ici avec moi, dans l’armoire… Je préfère sacrifier le repos de ma nuit…

— Papa, papa, je t’en prie, insiste Criquet.

Et les sanglots montent.

— Voyons, mon petit, fait celui-ci, je n’y avais pas réfléchi. Mais ma tante a raison : une écurie, ce n’est guère la place d’une jeune fille.