Page:Viollis - Criquet, 1913.djvu/90

Cette page a été validée par deux contributeurs.
78
criquet

Elle dévide ainsi ses jérémiades, doublement enchantée, car les événements lui ont donné raison et fourni en outre l’occasion de se lamenter avec abondance. Miss Winmie l’écoute, correcte et résignée, lissant du bout des doigts ses maigres bandeaux blonds.

La tempête grandit : le vent galope le long des ruelles étranglées du hameau, tourbillonne et siffle, soufflette les masures accroupies qui tressaillent, secoue les portes, les volets, soulève les toits ; et la mer gronde, hurle, bat sur les rochers à grands coups retentissants, monte furieusement à l’assaut de la petite île perdue.

La porte s’ouvre tout à coup, comme arrachée, devant M. Dayrolles et Le Bihan qui, poussés par la rafale, retiennent leurs capuchons à deux mains.

— Eh bien, mes enfants, fait le premier, il faut s’y résigner : impossible de partir ce soir.

Des exclamations de stupeur et de joie s’élèvent. Les petits, brusquement éveillés, crient d’effroi.

— Et maman ? demande Suzanne.

— J’ai pu la prévenir par le sémaphore… Pas d’inquiétude de ce côté. Maintenant, discutons la question couchage : nous avons tout juste découvert trois lits : un ici pour tante Éléonore — l’armoire qui est dans le mur…

— Coucher dans une armoire ! s’écrie celle-ci. Un vrai nid à punaises, sans doute ! D’abord, sans air, moi…