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criquet

— Je vois la tente ! crie Camille. Elle est dressée au même endroit que l’an dernier. On dirait qu’elle y a passé l’hiver.

— Toute la tribu campe autour…

— Avec armes, bagages.

— Et chameau : je vois tante Éléonore…

— Oh ! Michel !

— Tante Éléonore qui, de ses grands bras noirs, abat quelques noix, et miss Jenkins de profil, avec son beau tailleur khaki, ma chère : une planche d’acajou rabotée et peinte de frais.

— Déjà le nez sur son ouvrage ! Je parie qu’elle tricote encore une cruche en soie vert pâle… Ce qu’elle doit avoir d’amis qui jouent au bridge !

— Cette tache bleue avec un peu de blanc, c’est ta mère, dans son fauteuil à toit de paille.

— Elle tient un livre, mais je suis sûre qu’elle regarde le paysage, de son petit air triste et résigné.

— … Et cette flaque rose surmontée d’un point jaune qui remue : la belle Suzanne aux cheveux d’or, ta sœur et ma cousine ! Quant à ce paquet informe étendu à ses pieds, c’est bien, si je ne me trompe, l’illustre Jacques Broussot, admissible à Saint-Cyr, fils unique de madame veuve Éléonore Broussot, ta tante vénérable et vénérée ?

— Oh ! tu sais… la vénération, c’est une bosse qui me manque. Mais pourquoi Jacques n’est-il pas en train de courir les dunes avec son fusil ?