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criquet

d’herbe sur le balcon, avec une laisse en fil blanc autour de la taille… Un jour, nous l’avons trouvée en deux morceaux ! Elle remuait les pattes et paraissait toute vivante : nous l’avons recollée avec de la seccotine, et pendant quinze jours encore elle a bougé !

— J’ai bien un vague souvenir maintenant… Je te faisais peur, n’est-ce pas, en te disant que Jézabel c’était le diable ?

— Quel bon temps ! Et cette sauterelle qui est séchée entre deux feuilles de papier, comme une fleur ? Je l’avais prise en automne sur une vigne aux feuilles rousses où l’on trouvait des grains noirs, tout ridés, presque secs, avec un goût délicieux de confiture trop sucrée. La sauterelle faisait crisser les écailles de son dos, tristement, paisiblement : elle était presque gelée, la pauvre petite. Je l’ai gardée longtemps dans une boîte ouatée…

— Tu as toujours aimé ces affreuses bêtes ! Te souviens-tu que, l’an dernier encore, miss Winnie t’a fait dîner dans ta chambre parce qu’on avait trouvé un sac de cuir tout neuf, plein de terre, de mille-pattes, de cloportes, de toutes sortes d’horreurs ?

— Oui, dit pensivement Criquet ; je les avais attrapés sous de grosses pierres. Comme j’étais impatiente, lorsque je soulevais ces pierres ! C’était un pays nouveau qui m’apparaissait, avec les longues herbes écrasées et pâlies, les petites carapaces bleues ou noires, les mille-pattes en tire-bouchon, les cloportes