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criquet

— Mais, tante, Je ne veux pas me marier, je ne veux pas avoir d’enfants, je te l’ai déjà dit, sanglota Criquet.

— Tu me l’as dit comme tu me disais l’été dernier ; assez insolemment d’ailleurs : « Je ne veux pas être une jeune fille. » Et pourtant demain peut-être, tu seras une mère, une pauvre mère !

Madame Brousset leva les yeux au plafond.

— Profite du repos que tu es obligée de prendre, poursuivit-elle, et demande au ciel des forces pour gravir ton futur calvaire…

Criquet pleurait doucement, les nerfs brisés. Miss Winnie raide, figée, désapprouvait de toute sa figure fermée ce verbiage papiste, inutile et inconvenant. Tante Éléonore les contempla toutes deux avec satisfaction :

— Miss Winnie est certainement de mon avis, ajouta-t-elle, bien que la Providence, ayant sans doute d’autres vues sur son âme, lui ait évité la part des épreuves réservées aux épouses.

Cette allusion à son célibat acheva la déroute de miss Winnie. Alors, radieuse, triomphante :

— Je dois te quitter mon enfant, conclut tante Éléonore. Que ton ange gardien veille sur toi !

Et de son large pouce esquissant une croix dans l’espace, elle s’éloigna, cinglant avec majesté.

— Ne sentez-vous pas, ma chère miss Winnie, que la cheminée fume ? dit-elle encore avant de disparaître.