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mot ? Est-ce d’autre chose ? Mais il rit. Phénomène rare et singulier. Il baisse la tête. Camille voit des veines se gonfler sur son front, elle entend des hoquets étouffés, le bruit d’un sac de noix qu’on agite, d’étranges gargouillements, et quand il se redresse, il semble presque rouge et son œil vert est près de cligner.

Camille sourit aussi, d’un air complice, et hoche la tête en mordillant son porte-plume qui a un goût de caoutchouc brûlé.

— Puisque vous êtes malade, reprend M. Poiret, — et un dernier spasme fait saillir entre les pointes de son col cassé sa pomme d’Adam, aussi pointue que celle du platane du parc — nous allons expliquer une ode d’Horace que nous choisirons de circonstance…

Mas Criquet lui coupe la parole, lui arrache le livre :

— Oh ! monsieur, soyez tout à fait gentil et laissez-moi choisir moi-même : il y a une poésie d’Horace que j’aimerais tant traduire parce qu’elle a une si jolie forme ! Cela trace sur la page le contour d’un vase qui est au salon…

Elle commence à déclamer un vers latin.

M. Poiret fait sur sa chaise un saut de carpe et Camille reçoit un coup de pied en plein tibia.

— Non, mademoiselle, non… Je ne peux pas permettre, bafouille-t-il. Il serait préférable, je crois, de passer à un autre morceau…

— Pourquoi ? demande Criquet en levant sur lui des