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une touffe de lichen gris et la posait sur sa paume.

— C’est la quarante-cinquième variété que je découvre ici, disait-il, et cette fois je crois bien que j’ai la collection complète. Il n’y a pas une plante, une mousse, un brin d’herbe de l’île que je n’aie cueilli, séché, catalogué, mademoiselle. Aussi verra-t-on bientôt en librairie : Flore marine de l’île Aulivain, par Arsène Bernard, de l’Académie de Rennes.

Son œil vert remuait de joie au-dessus de son nez. Puis brusquement, le large chapeau de paille se retournait vers la mer et Camille, les mains derrière le dos, considérait avec déférence le bouchon rouge qui dansait sur les vagues.


Les jours pluvieux, elle demeurait assise au pied de la chaise longue de sa mère. Dehors l’averse tombait, une de ces brusques averses de septembre qui envahissent tout le ciel, le blanchissent et passent. Elle regardait les vitres où s’écrasaient les gouttes rageuses et, entre leurs rayures obliques, les arbres tordus par le vent. Puis ses yeux revenaient à sa mère qui, étendue, laissait machinalement couler ses bagues trop larges le long de ses doigts amaigris. Le jour faux de l’orage entourait d’ombres livides les paupières mi-closes, des tressaillements couraient sur les tempes jaunies et de temps à autre un soupir où un petit cri s’échappait de la bouche entr’ouverte.