Page:Viollis - Criquet, 1913.djvu/145

Cette page a été validée par deux contributeurs.
133
criquet

— Brrr ! Quelle horreur ! crie Marc.

— Ça pique le nez, ça fait pleurer les yeux ! ajoute Maurice.

— Est-ce qu’on va la garder ?

— Si vous voulez, répond Criquet sans trop d’enthousiasme. Seulement allez chercher mon sac en cuir de Russie.

— C’est ça, c’est ça ! Nous la soignerons bien, nous l’apprivoiserons !…

Camille hoche la tête, en considérant la jardinière qui se débat entre ses doigts. À cet égard encore, elle n’a point conservé d’illusions.

Elle se plaisait naguère à dresser les bêtes, à leur apprendre la vie et les mœurs des hommes. Les hannetons étaient ses disciples d’élection ; elle voulait les rendre meilleurs, plus intelligents, plus instruits. De bonne heure, le matin, elle allait secouer les sycomores, leurs arbres favoris, où ils s’endorment, collés au dessous d’argent des feuilles, après avoir tournoyé tout le soir dans le bruit de leurs ailes crissantes. Ils tombaient un à un, comme des petits marrons d’Inde secs, les pattes et les antennes soigneusement repliées, tout engourdis encore.

Parfois ils étaient deux, attachés ensemble, deux amis qui, sans doute, n’avaient pas voulu se quitter. Leur corselet noir et leur robe brun vif étaient ternis de poudre blanche et de pollen. Camille sortait alors son mouchoir de sa poche et, avec un coin mouillé de