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dant les derniers temps de son séjour, il ne cessait d’arpenter fiévreusement le pays d’un rivage à l’autre.

— On étouffe ici, disait-il avec impatience, c’est trop peu ! À peine a-t-on commencé à se dérouiller les jambes dans un sens qu’on se cogne à la mer…

L’idée lui était d’abord venue de construire une barque lui-même et pendant quelques jours, confiné dans le hangar où il ne laissait pénétrer personne, il avait ébranlé la maison de ses coups de marteau ; mais le bois de l’île étant insuffisant, il n’eut pas la patience d’attendre qu’on lui en envoyât du continent.

Alors, il imagina de constituer un grand troupeau ; il rafla les quelques moutons de l’île et en confia la garde à la fille aux eaux grasses, toute fière de cette multiplication de bêtes.

— Tu comprends, disait-il à madame Dayrolles, nous serons sûrs de manger tout l’hiver de la viande propre, notre viande, du vrai mouton de pré-salé. À Paris, hein ?

— Mais comment les tuerons-nous, ces bêtes ? Et comment pourrons-nous manger tout un mouton en quelques jours ? gémissait madame Dayrolles. Toujours vos entreprises chimériques, mon pauvre ami !

— Tu as raison, ma petite Jeanne, lui répondit-il une fois, ce n’est pas très pratique, mon invention. Quand on s’ennuie, vois-tu, on fait des bêtises… Débarrasse-toi comme tu l’entendras des moutons et