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groupées comme un troupeau de moutons immobiles. Criquet n’aimait pas les cimetières. Mais elle voulut arriver à la maison pendant que Suzanne ferait sa toilette pour le dîner, et l’on dînait à six heures. Devant la grille ouverte, elle grimpa sur le talus de la route pour ne pas mettre ses pieds où tant de cercueils avaient passé, jetant vers l’enclos un regard craintif et curieux.

La même brise silencieuse faisait cliqueter les perles des couronnes, le fil de fer des entourages, les graines des plantes folles, et un frémissement semblable à un murmure courait des tombeaux des riches aux croix de fer et aux tertres herbus des pauvres.

« Ils parlent », se disait-elle, et tout en fuyant avec effroi, elle éprouvait du bonheur à se sentir si vivante, de la pitié pour ceux qu’elle laissait là-bas tout raides sous leurs pierres.

Elle s’arrêta une seconde devant Le Bihan qui se dirigeait vers la plage, balançant deux grosses araignées de mer aux pattes molles et poilues :

— C’est pour appâter mes casiers, expliqua-t-il. Elles puent.

Avec un rire épais secouant les plis de son ventre dans sa culotte au fond tombant, il les passa sous le nez de Criquet qui frissonna de dégoût. Elle pensait encore au cimetière… Oh ! ce Le Bihan, quel vilain homme !