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d’un bond le talus, écarte des branches et entre dans l’ombre. Seules, quelques gouttes de soleil sont tombées sur le tapis de mousse ; elle avance en hésitant, se frottant les yeux pour s’habituer au clair-obscur et de suite aperçoit Jacques étendu dans l’herbe, près du minuscule ruisseau qui a fait naître toute cette fraîcheur. Le pantalon de toile de son cousin est souillé de boue et de taches vertes. Il semble lire quelque chose. Elle se rapproche doucement et s’arrête ; il ne l’entend pas sans doute. Elle gratte la terre du pied, puis tousse avec discrétion. Rien ne bouge.

— Jacques, fait-elle alors timidement, Jacques, ta mère te veut pour une lettre qu’il faut écrire.

— Laisse-moi tranquille, je m’en fiche, répond une voix maussade.

Camille ne se fâche pas. Les gens tristes ont le droit de ne pas être aimables. Elle s’éloigne un peu, s’allonge à son tour par terre, et attend, le visage contre une touffe de mousse. Elle s’y caresse le nez et les lèvres, la respire et y enfonce ses deux mains ; On dirait de larges gants de laine froide. Le dessus est tiède, le fond humide et glacé, comme dans le sable,

Que c’est drôle un brin de mousse ! Cela ressemble à un de ces sapins au cône de petits copeaux verts et frisés, qui se tiennent debout sur une rondelle dans les arches de Noé et sentent la colle et le vernis. Et,