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« Sera-t-il assez grand pour que Jésus puisse y entrer ? » se demande-t-elle, craintive.

Que toutes ses compagnes réunies à l’église paraissent grandies et graves avec leurs visages nouveaux, si étranges sous le bonnet à ruches qui cache leurs cheveux ! Cette petite femme aux lèvres closes, aux paupières baissées, est-ce bien la joyeuse Louise Boyer qui a une grande bouche ouverte par le rire, des robes si courtes et des mollets si ronds ?

Voici venir le moment sacré… Plus que des minutes, oh ! mon Dieu !

« Mon bien-aimé ne paraît pas encore… » chante une voix.

L’orgue profond, les violons ardents, les harpes célestes grondent, soupirent, pleurent ; des buées d’encens voilent l’autel et ses mille flammes roses : les prêtres agenouillés sous leurs chapes brillantes, les bras tendus vers les étoiles de la voûte, étincellent dans des parfums bleus. « Et tout cela pour moi si petite, si ignorante, si indigne », pense Camille, éperdue.

Elle s’avance à son rang, derrière les autres. On dirait un chemin blanc qui marche. Elle chancelle, tombe à genoux devant l’autel, relève son voile, ouvre ses yeux noyés puis les ferme, éblouie, tend ses lèvres sèches, frissonnantes, tend son âme… Un grand vide se creuse en elle.

Des paroles latines murmurées au-dessus de sa